La rentrée littéraire des auteurs belges se fait souvent en deux fois. Il y a celles et ceux qui sont édités en France, et dont les ouvrages paraissent dès les mois d'août et septembre.
Pour celles et ceux édités en Belgique, les parutions sont parfois plus tardives.
Et parmi les premiers, quelques figures bien connues...
Eunice, dix-neuf ans, athlète, étudiante en fac de psycho, vient de se faire larguer par son petit ami. Alcool et danse pour tenter d'anesthésier la tristesse.
En se réveillant avec une gueule de bois carabinée, la jeune femme pense avoir touché le fond mais les nombreux appels en absence laissés sur son portable par son père annoncent le pire. Sa mère, Jane, est morte, d'une chute dans l'eau du fleuve au sortir d'une boîte de nuit. L'enquête conclut très vite à un simple accident mais Eunice refuse d'y croire.
Et si un agenda rouge retrouvé dans un salon de coiffure lui donnait raison ? Et si les initiales écrites sur plusieurs pages étaient un indice ? Pour Eunice, c'est le début d'une quête de vérité afin de comprendre qui était cette mère dont elle réalise qu'elle ne connaissait pas grand-chose. Le choc du deuil rappelle que toute famille est le lieu de secrets enfouis.
La rencontre avec la sereine et superbe Jennah marquera un tournant vers l'apaisement.
Eunice est une histoire d'amours, de sororité, de transmission et de rémission. C'est aussi un éveil à la tendresse et au pardon. Un roman coup de poing, porté par une langue très rythmée.
Fabienne Verstraeten enquête sur le destin de deux hommes, otages de l'Histoire. De détails en méditation, de souvenirs en zones d'ombre, le récit tente de circonscrire ce qui s'inscrit de manière obscure dans la succession des générations. Pas à pas, comme les porteurs du cercueil d'Aloïs sur la place communale de Jette, nous approchons le mystère.
W ou le Souvenir d'enfance est, comme vous le savez, un splendide livre de Perec, alternant fiction et autobiographie.
V. ou la mélancolie s'inscrit dans cet héritage littéraire.
À partir d'une photographie de funérailles nationales dans les années 1960 en Belgique, Fabienne Verstraeten enquête sur le destin de deux hommes, otages de l'Histoire. Le premier (Aloïs, le père), résistant de l'ombre, fut fusillé par les Allemands en 1943. Le second (André, le fils), douta cependant de l'héroïsme de son père et sombra dans une indicible mélancolie. Soixante-dix ans plus tard, il mit un terme à sa vie, et sans doute à sa mélancolie, en sautant par une fenêtre de la maison de retraite où il finissait ses jours.
De détails en méditation, de souvenirs en zones d'ombre, le récit tente de circonscrire ce qui s'inscrit de manière obscure dans la succession des générations. Pas à pas, comme les porteurs du cercueil d'Aloïs sur la place communale de Jette, nous approchons le mystère.
On se demande souvent ce que l'on ferait à la place de l'autre. Mais à cette question, il est impossible de répondre tant chacun a sa façon de vivre et de penser. Pour Charly Delwart, la question qui se pose plutôt serait : «Que ferais-je à ma place ?» De situations anodines - répondre à un SMS, aller aux urgences, lire la presse - surgissent des questions fondamentales : ne communiquerai-je à terme plus qu'en émojis ? Que suis-je prêt à faire pour ma survie ? Serai-je un jour un lanceur d'alerte ? Et pour chacune, plusieurs réponses s'offrent à nous. Charly Delwart a capturé soixante-dix questions et, avec beaucoup d'esprit et d'humour, il les déplie pour former le questionnaire à choix multiple de son existence avec, en filigrane, une question qui nous relie tous : comment mener la seule existence qu'on a ?
Ecrire, c'est voler. Amélie NothombPalmarès des libraires - Livres Hebdo 2023 Sélectionné pour le Prix Littéraire 2023 du journal Le Monde. Magnifique. Version Femina Psychopompe [...] s'avère le complément parfait à Stupeur et tremblements. Le Devoir [...] Amélie Nothomb célèbre ici les altitudes qui permettent non seulement de mieux percevoir le monde, mais de lire autrement. Le Monde
Les Dragons est l'histoire d'un coup de foudre entre adolescents plus normaux qu'il n'y paraît. Un cri d'amour pour ces enfants que notre société cache, mais qui disent tant de nous.
Jérôme a quinze ans. Il est en colère contre ses parents qui sentent le vieux. Contre le monde qui le rejette. Contre les monstres qui l'empêchent de dormir. Contre lui surtout. Sur décision de justice, il est interné dans un centre de soins pour adolescents.
Là, il rencontre les dragons, ces enfants détruits par leur famille, l'école ou l'époque. Parmi eux, il y a Colette. Crâne rasé, bras lacérés, noir sur les yeux.
Elle veut mourir. Il veut l'embrasser. L'emmener loin d'ici.
Que se passe-t-il lorsqu'un auteur, qui a beaucoup écrit sur l'enfance, remonte le fil d'argent de sa propre enfance ?
Le Plus Court Chemin est un hommage aux proches et la tentative de revisiter avec les mots ce vaste monde d'avant les mots : les êtres, les lieux, les sentiments et les sensations propres à cette époque sur le point de disparaître, les années d'avant la cassure, d'avant l'accélération générale qui suivra la chute du mur de Berlin.
Raconter l'existence dans les paysages infinis de la campagne wallonne, dire l'amour et le manque. Car écrire, c'est poursuivre un dialogue avec tout ce qui a cessé d'être visible. Par-delà la nostalgie.
« Parfois, dans ces moments, quand il avait pris un verre de vin et qu'une très légère ivresse arrondissait les angles de son esprit, il oubliait que le monde avait disparu. »
Fils du désert, Ismaël navigue chaque année sur La Mirabelle pour honorer son rendez-vous avec la mythique Moby Dick qui, pour la première fois, se dérobe. Lors d'une escale à Amsterdam, il embarque Anaïs, rencontrée dans un bar à hôtesses : « comme Moby Dick fuit le capitaine Achab, les baleiniers, elle fuit celui que j'appelle Achab II, le chasseur dont j'ignore tout ».
Écume déploie trois itinéraires marins, trois lignes de fuite qui s'entrechoquent et s'embrassent : le voyage d'Ismaël qui est aussi une cartographie des ravages subis par l'océan, « cet enfer épileptique aux neuf cercles mazoutés » ; l'errance d'Anaïs façon Querelle de Brest, les migrations des cétacés.
C'est un roman d'amour, un poème océanique et une charge contre la destruction du vivant, la rapacité de l'homme.
Les mots de Véronique Bergen débordent du papier. Son Écume est un raz-de-marée. Un vent brûlant sur la folie du monde.
« Je voulais, écrit Jean-Philippe Toussaint, que ce livre traite autant des ouvertures que des fins de partie, je voulais que ce livre me raconte, m'invente, me recrée, m'établisse et me prolonge. Je voulais dire ma jeunesse et mon adolescence dans ce livre, je voulais débobiner, depuis ses origines, mes relations avec le jeu d'échecs, je voulais faire du jeu d'échecs le fil d'Ariane de ce livre et remonter ce fil jusqu'aux temps les plus reculés de mon enfance, je voulais qu'il y ait soixante-quatre chapitres dans ce livre, comme les soixante-quatre cases d'un échiquier. »
UN ROMAN POIGNANT SUR L'AMITIE ET SA VULNERABILITE Avoir un ami, des amis, penser que c'est pour la vie, nous avons tous connu cela; Puis un incident, un malentendu, vient briser le lien.
Ici, l'amitié qui relie 4 femmes semble indéfectible. Mais la mort du fils d'Anne, la culpabilité de Delphine dans l'accident vont provoquer une première fêlure.
Souvent, ne pas accepter que l'autre ait une conception différente de la vie est source d'incompréhension mutuelle. Ainsi, Eléonore va petit à petit s'éloigner de ses amies, excédée par leur insistance à lui faire quitter son mari violent.
Quant à Noémie, peut-être amoureuse de l'une des 3 autres sans oser l'avouer, elle choisit la la fuite en s'installent avec son avocate.
Le roman se termine par un drame (la pendaison d'Anne) et une réconciliation (entre Delphine et le mari qu'elle avait délaissé pour ses amies).
Corine Jamar habite à Bruxelles est est l'auteure d'une dizaine d'ouvrages parus ailleurs (Fayard, Robert Laffont, Cherche midi).
Il y a des choses que l'on écrit parce qu'on n'a pas pu les dire. Nora envoie une longue lettre à son père, qui vit dans une autre ville. Cette ville, elle l'a quittée pour apprendre le chant à Bruxelles. Mais aussi pour autre chose. « Ma vie n'est pas exactement comme je te l'ai racontée. » L'enfant que connaît ce père était un « il ». Il se prénommait Raphaël. Tout ce que le père ignore, le voici, depuis l'enfance, la mort de la mère. Les déguisements que portait le petit garçon. Les princesses qu'il dessinait. Les brutalités subies dans la cour du collège. Les mensonges. La douleur. Et puis, un jour, une lumière : le chant. Et le départ. Et ce que Nora est devenue, sa nouvelle vie. Voici un sens inédit ajouté au « Je est un autre » de Rimbaud.
Loin d'être une lettre d'amertume, de vengeance ou de règlement de comptes, la lettre de Nora est une lettre d'amour. Lettre d'amour à un père, dans l'espoir qu'il comprendra. Lettre pour s'aimer soi-même, aussi, enfin.
Un roman bouleversant, et d'autant plus qu'il évite les excès de la plainte comme de la caricature, sur l'identité, mais aussi sur le passage à l'âge adulte, le perfectionnement d'un art, le renouement avec l'acte d'aimer.
Un western chorizo en Andalousie !
Les vacances rocambolesques d'une vieille dame délurée embarquée dans une vendetta farfelue, entre mémoire traumatique et reconquête joyeuse d'elle-même.
« Aujourd'hui du haut de mes mille années, il m'apparaît qu'à bien des âges de ma vie, j'ai eu «peur pour mon corps». De cette bonne vieille trouille qui vous agrippe les tripes et vous pique et vous nique. J'ai eu peur dans toutes mes cours de récré, pour mes seins naissants, pour mes fesses, mes culottes, mon sexe, peur des moqueries, des attouchements, de la violence. Et peur en famille aussi. »
«Très franchement, je ne crois pas qu'on puisse parler d'un monde dans la langue d'un autre monde. Je ne veux pas dire que ce ne serait pas souhaitable, simplement que ce n'est peut-être pas possible. À moins de recourir à des artifices. Sauf que tout ça prend du temps, tout ça demande de l'énergie, et je ne crois pas qu'on en ait tant que ça. Parce qu'autant le dire clairement : je ne la parle pas leur langue, je ne l'ai jamais parlée. Avec le temps, j'ai fini par la comprendre.» Avec la version, Debora Levyh nous entraîne à la rencontre d'un peuple imaginaire et insaisissable. Observation poétique de leur artisanat, leurs coutumes, leur rapport au temps et à l'écriture, ce récit aux accents anthropologiques nous plonge avec inventivité au coeur d'un groupe d'individus en mue perpétuelle, chez qui la notion d'identité n'a pas de valeur. La description de cette mystérieuse communauté est aussi l'occasion pour Debora Levyh de proposer une fine analyse sur la question du langage, et plus particulièrement sur la difficulté à parler d'une culture dans une langue qui n'est pas la sienne. Au-delà de sa force descriptive, ce premier roman brille par l'étrangeté de sa poésie, où l'onirisme côtoie des visions surréalistes aussi déroutantes que fascinantes.
Des bras contre du charbon?». Dans l'immédiat après-guerre, la Belgique cherche de la main-d'oeuvre pour exploiter ses mines. Elle scelle, en 1946, un accord avec l'Italie qui, en échange de l'achat prioritaire de charbon, enverra des milliers de jeunes travailleurs dans les mines belges.
Originaire des Pouilles, Donato est l'un de ces ouvriers mineurs ayant tout quitté pour venir vivre et travailler au Pays noir. Ce livre raconte son histoire, ou plutôt il l'imagine à travers les yeux de Clio, la petite-fille de Donato, partie à la recherche de cette vie que son grand-père n'a jamais racontée.
Dans ce premier roman d'une extraordinaire inventivité langagière, Éléonore de Duve ravive tout un monde de sensations, de rencontres, d'existences entremêlées. Elle nous plonge, avec une prodigieuse force d'évocation, au coeur de la jeunesse italienne de Donato, dans les collines lumineuses des Pouilles jusqu'au noir sans fond de la mine. C'est une quête, aussi prudente qu'aimante, que Donato donne à lire?: restituer la consistance d'une vie, en affirmant la capacité de la littérature à dire ce qui a été arraché et tu.