"J'ai quelque chose à dire. Et c'est très court." Voilà qui résume la forme lapidaire, définitive et jouissive, privilégiée dans ce recueil, à mi-chemin entre le journal et le cahier d'humeur. Poèmes, aphorismes, sentences entendues et brefs récits se succèdent à un rythme effréné, comme s'il l'on suivait le cours de la pensée de ce poète anti-poète. Scutenaire ose écrire ce qu'il pense et touche à tous les registres du verbe. Il décrit les livres qu'il aime, les auteurs qui comptent, les mots qui lui importent ou les attitudes qui l'insupportent. Ce recueil regorge de trouvailles langagières et philosophiques, forme un puits de connaissance inépuisable et un témoignage sensible sur une personnalité hors du commun. "C'est ça le génie : ne pas le faire exprès."
Au fil des ans, Scutenaire a égréné ses Inscriptions, dans le sillage de Restif de la Bretonne ou de Lichtenberg. Bien plus que de simples aphorismes - avec ce que le terme peut comporter de creux ou de factice -, les réflexions de Scutenaire vont au plus profond sans avoir l'air d'y toucher. Sa méfiance généralisée perce à ce jour les ressorts cachés du moi et du monde, et de cette déconstruction naît une oeuvre d'une richesse infinie, à laquelle on peut sans cesse revenir puiser.
« Je ne suis pas un écrivain, je suis un être sonore », notait Louis Scutenaire dans le premier volume de "Mes inscriptions", ainsi dénommées en hommage à Nicolas Rétif de la Bretonne. Polygraphe impénitent, il accumule, depuis de nombreuses années, notes quotidiennes, sentences lapidaires, poèmes paradoxaux ou récits amoureux, bâtissant minutieusement - et presque malgré lui - un étonnant édifice littéraire dans lequel l'affabulation et les faits biographiques authentiques se mêlent étroitement. Par l'apparente banalité de ses propos, volontiers contradictoires, et un humour dévastateur, il s'avère proche cousin de Lichtenberg ou de Swift.