Helsinki, 2016. Olenka, assise sur un banc dans un jardin public, observe un couple et leurs deux enfants en train de jouer avec leur chien. Une femme vient s'asseoir à ses côtés. Olenka sursaute : malgré les années, elle la reconnaîtrait entre mille. Après tout, Olenka n'a-t-elle pas ruiné la vie de cette femme, sa soi-disant amie ? Et cette dernière est sans doute ici pour lui rendre la pareille. Elle seule connaît la vérité sur ce qu'a fait Olenka, d'où elle vient et de qui elle se cache. Malgré tout, pendant un court instant, les voici à nouveau réunies, spectatrices impuissantes de la vie qu'elles auraient pu avoir, si elles avaient fait d'autres choix.
Faisant alterner son récit entre la Finlande contemporaine et l'Ukraine aux premiers jours de la transition post-Soviétique, Sofi Oksanen raconte avec une acuité rare la trajectoire de ces deux femmes incapables de se libérer du passé. Leurs histoires d'amitié, d'amour, d'ambition et de trahison, résonnent douloureusement dans ce monde où le corps des femmes est souvent réduit à une marchandise. Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli
« Un vrai chef-d'oeuvre. Une merveille.
J'espère que tous les lecteurs du monde, les vrais, liront Purge. »
Nancy HustonEn 1992, l'union soviétique s'effondre et la population estonienne fête le départ des Russes. Mais la vieille Aliide, elle, redoute les pillages et vit terrée dans sa maison, au fin fond des campagnes.
Ainsi, lorsqu'elle trouve Zara dans son jardin, une jeune femme qui semble en grande détresse, elle hésite à lui ouvrir sa porte. Ces deux femmes vont faire connaissance, et un lourd secret de famille va se révéler, en lien avec le passé de l'occupation soviétique et l'amour qu'Aliide a ressenti pour Hans, un résistant. La vieille dame va alors décider de protéger Zara jusqu'au bout, quel qu'en soit le prix.
Sofi Oksanen s'empare de l'Histoire pour bâtir une tragédie familiale envoûtante. Haletant comme un film d'Hitchcock, son roman pose plusieurs questions passionnantes : peut-on vivre dans un pays occupé sans se compromettre ? Quel jugement peut-on porter sur ces trahisons ou actes de collaboration une fois disparu le poids de la contrainte ?
Des questions qui ne peuvent que résonner fortement dans la tête des lecteurs français.
la nuit je regarde ton cou
et je veux le serrer
comme tu voulais m’étrangler
par terre dans la cuisine
Tel un journal de la condition féminine contemporaine, les textes de Sofi Oksanen donnent à voir les violences conjugales dans tout ce qu’elles ont de plus cru, pour mieux les dénoncer. Adoptant un ton volontairement féroce et teinté d’humour noir, l’auteure fait la lumière sur les injustices quotidiennes que subissent les femmes. Elle renverse l’image récurrente de la femme victime, laissant place à l’idée de vengeance, le bras armé d’un couteau de cuisine.
C’est un cri saisissant, habituellement étouffé, qui résonne ici haut et fort.
Née en 1977 d'une mère estonienne et d'un père finlandais, Sofi Oksanen s'est rapidement imposée comme une auteure majeure de la scène littéraire internationale. Son troisième roman, Purge, a été couronné en France par le prix Fnac et le prix Femina étranger. Ses livres sont traduits dans plus de cinquante langues.
Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli
Les « vaches de Staline », c'est ainsi que les Estoniens déportés désignèrent les maigres chèvres qu'ils trouvèrent sur les terres de Sibérie, dans une sorte de pied de nez adressé à la propagande soviétique qui affirmait que ce régime produisait des vaches exceptionnelles. C'est aussi le titre du premier roman de Sofi Oksanen, dont l'héroïne, Anna, est une jeune Finlandaise née dans les années 1970, qui souffre de troubles alimentaires profonds. La mère de celle-ci est estonienne, et afin d'être acceptée, cette femme a tenté d'effacer toute trace de ses origines, et de taire les peurs et les souffrances vécues sous l'ère soviétique. Ne serait-ce pas ce passé qui hante encore le corps de sa fille ?
Sofi Oksanen fait preuve d'une grande puissance d'évocation quand elle décrit les obsessions de ces deux femmes. Il y a la voix d'Anna qui tente de tout contrôler, son corps, les hommes, et le récit plus distant de la mère qui se souvient de la rencontre avec « le Finlandais », à Tallinn, dans les années 1970, sous un régime de terreur et de surveillance.
Occupation, résistance et collaboration sont les ressorts de ce roman puissant, dans une Estonie prise tour à tour au piège des communistes et des Allemands. Pour répondre aux errances de l'Histoire, chacun devra choisir un camp, un chemin. Roland, le juste, combat sans relâche l'envahisseur ; son cousin Edgar, véritable caméléon, épouse successivement l'idéologie du pouvoir ; enfi n Juudit, sa femme, est écartelée entre son amour sincère pour un offi cier allemand et l'hypocrisie suffocante d'un mariage raté. Mais qui sera le vainqueur de cette lutte acharnée ?
« Elle payait le taxi, cherchait des sièges libres, veillait sur le bien-être de sa compagne. Dans les bars homos, on coupait la file d'attente et elle me présentait à tout le monde. Dans les soirées nanas, on dansait des slows et elle respirait encore sur ma nuque. C'était la perfection. »
Qu'est-il arrivé à Piki, la fille la plus cool d'Helsinki, qui vit désormais recluse dans son appartement ? Submergée par de terribles crises d'angoisse, elle ne parvient plus à faire face au quotidien. Faire des courses ? Impensable. Boire un verre dans un bar ? Impossible. Sans compter sur les problèmes financiers. Comment gagner sa vie lorsqu'on refuse d'interagir avec le monde ? La narratrice, son grand amour, tente de l'aider comme elle peut. Ensemble, elles vont monter une entreprise d'un goût douteux pour exploiter la faiblesse des hommes. Au mépris d'elle-même, elle va essayer de la sauver. Mais à quel prix ?Hommage à Qu'est-il arrivé à Baby Jane de Robert Aldrich, le second roman de Sofi Oksanen explore la question de la féminité et de l'homosexualité sous un angle contemporain.Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli