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Héritier d'une longue lignée de paysans hors norme, Benoît Biteau est un paysan résistant. Ingénieur agronome, il aurait pu couler une vie paisible de haut fonctionnaire sans jamais remettre les mains dans la terre.
Oui, mais voilà, cette terre, il l'a dans le sang. Et quand son père, tenant d'une agriculture productiviste, décide de partir en retraite, il relève le défi.
En quelques années seulement, il fait d'un terroir épuisé par des pratiques intensives et d'une exploitation dans une impasse écologique et économique une ferme rentable couronnée par le Trophée national de l'agriculture durable.
Il délaisse les kilomètres de tuyaux, les bidons d'engrais et de pesticides. Et adopte les fondamentaux de l'agronomie et du bon sens paysan. On le suit pas à pas dans la transformation de sa ferme. Et les résultats sont là. En se tournant vers des races rustiques, des semences anciennes, en replantant des arbres, la ferme de Benoît devient chaque jour plus productive, plus rentable et plus respectueuse de l'homme, des animaux et de la nature.
Par son parcours (du combattant), Benoît Biteau apporte la preuve qu'une autre agriculture est possible. C'est un appel qu'il lance à tous les agriculteurs enferrés dans une logique qui les tue : changez de modèle, le bonheur est dans le pré !
Benoît Biteau est paysan agronome à l'EARL Val de Seudre Identi'Terre. En mars 2010, il est élu vice-président de la Région Poitou-Charentes et, en décembre 2015, il est réélu au conseil régional de Nouvelle-Aquitaine. -
Notre siècle a perdu l'homme de terre. Le Sud paie de sa survie l'élimination massive des paysans. A l'Est, après soixante-dix ans de communisme, le marteau a écrasé la faucille. Et au Nord, les excès de la modernité, des machines et de la chimie préparent l'avènement d'une banquise brune, ces jachères qui cultiveront demain leur gémellité avec la friche, sauf si l'intelligence ou le bitume... Paysans sans terres sous les tropiques, terres sans paysans sous nos yeux, glorification fatale de l'homme de fer dans l'ancien " glacis ", c'est partout le désarroi.
Il subsiste cependant une agriculture vivante et diverse, dont les performances n'ont pas gommé l'apprentissage des savoirs, des terroirs, des gestes ancestraux sans cesse améliorés. Cette agriculture, perçue comme un art de localité, existe en France, pays au climat tempéré qui n'ignore pas les passions. Epilogue d'une lointaine hémorragie, la plupart des paysans auront disparu à la fin du siècle. Ceux qui resteront vont connaître un vertige horizontal: occuper, avec bêtes et plantes, plus de la moitié du territoire français. Esseulés et nécessaires funambules, surhommes de la terre. Dix mille ans après son apparition, l'agriculture est-elle encore cet acte d'enracinement qui marqua la fin du nomadisme et rendit tangible le souci du lendemain? Le XXIe siècle en quête de spiritualité retrouvera peut-être la foi du semeur qui sacrifie une graine pour voir lever un épi. Si elle le veut, la France sera le pays où s'arrête la chasse à l'homme de terre.
Eric Fottorino, trente-trois ans, est journaliste et écrivain, chargé d'enseignement à l'Institut d'Etudes politiques de Paris. Ancien spécialiste des questions agricoles au Monde, il a publié plusieurs essais dont La France en friche (Lieu Commun, 1989). Il est l'auteur d'un roman, Rochelle, paru en 1991 chez Fayard.